Natacha SNG GUILLER

Ça déborde. Ça n’attend pas. Ça diffuse. Chez Natacha Guiller. Ou SNG, ou S Natacha Guiller ou Essen-G (E S S E N tiret G). Des identités multiples pour une jeune poète hyperactive et pluridisciplinaire qui s’invente et se réinvente pour ne pas perdre sa propre trace. Poète, plasticienne, performeuse, et paire-praticienne en santé mentale, elle pratique aussi la danse, la musique, la vidéo.
Occuper l’espace. De l’urgence donc. Une énergie débordante à dire, à archiver le quotidien, le réel, dans une permanente ébullition. Une activiste de l’archive personnelle, que ce soit sa vie, mais aussi la société croisée, auscultée, décryptée.
« Tout ce qui se passe dans ma vie a besoin d’être retranscrit ou tracé, j’évolue dans l’urgence à organiser toutes ces pensées qui en appellent d’autres, la musique jamais ne s’arrête » explique-t-elle.
L’on songe à la phrase certes rebattue d’Hölderlin« Habiter le monde en poète » mais qui sied à merveille à SNG, qui peut battre le pavé lors d’insomnies, apprendre à voix haute ses textes, noircir sa peau de notes, comme elle couvre ses multiples carnets d’une écriture nerveuse. Habitée.
« L’Art permet de ralentir et modérer mon auto-sabotage » dit-elle. Recréer le monde n’est pas un choix, c’est plus un motif de survie ».
Ce débordement se vit sur des scènes (sous des formes performées dans l’espace public), des échanges avec des personnes souffrant de handicap, de maladie, ou vivant dans les marges, autour d’installations sonores participatives ou des fresques interactives.
Alors un livre. Pourquoi pas un livre ? C’est « Mocassin, je me prépare, et autres récifs en cours », réunissant trois ensembles, et pas chez n’importe quel éditeur : Nouvelles Editions Place, consacrées à la poésie performatrice. Et sans doute faut-il voir dans ce livre une photographie à l’instant T d’un travail en cours de SNG. « La poésie sonore n’a rien à voir avec lire mon écriture sur une feuille ». Même si l’on perçoit dans ces ensembles de textes tout l’organique de son écriture, son mouvement, son empressement, ses hoquets, ses pulsations. « Ca me déborde » dit-elle. « Je peine à construire une narration linéaire ou plus romanesque, structurée ». Donc, la poésie. Donc, la performance pour faire déborder les mots jusqu’au corps. « Mocassin » alterne des formes courtes et longues, des formes éclatées comme des explosions de vers, des aphorismes comme des post-it. Le corps du texte aussi déborde, on a des mots pleins la bouche, qui peuvent sonner entre eux, se répéter, se bousculer. Il y a de la violence. Il y a de l’humour. Toute une vie.
« Je tourne en rond dans ma chambre comme dans une machine à laver ». Et puis on repart pour un tour.
Il y a quelque chose de l’art brut dans le travail de SNG, dont elle se sent proche. Marginale, décalée, rebelle.
Ou tout simplement artiste totale.

Sophie G. Lucas,
Octobre 2021

 

Voir un extrait de sa performance du vendredi 15 octobre 2021 lors du festival MidiMinuitPoiésie#21

Lire la Gazette 2021 écrite par les élèves du lycée Louis-Jacques Goussier (Rezé).

Lire l’interview de Natacha Guiller par des élèves de 1er du lycée Nicolas Appert (Orvault).

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