Clémentine Mélois

Clementine Melois -c- Olivier Guitard

Ce jour-là, Clémentine Mélois nous propose, pour inaugurer Midi-Minuit, une « causerie littéraire ». Ce genre un peu compassé, désuet, nous fait craindre un long moment d’ennui académique. De plus, Clémentine Mélois n’est pas poète, elle se défend même de toute formation littéraire.

Rassurons-nous. Elle est de formation artistique. Elle enseigne aux Beaux-arts, l’art de faire des livres. Elle en fait elle-même, de beaux, de drôles, des livres dits d’artiste en un seul exemplaire parfois.

Son rapport à la culture et à la littérature n’est pas académique, mais serait plutôt iconoclaste. Et ce jour-là, elle vient nous parler de sa bibliothèque, et de quelques auteurs, auxquels on ne s’attend peut-être pas.

Elle a découvert la littérature très jeune, en autodidacte curieuse et gourmande. À douze ans elle lit Tolkien, et décide qu’en dehors du Seigneur des anneaux, rien ne vaut d’être lu, tout ne pouvant être que décevant.

Elle est comme ça, Clémentine : très entière.

Après un temps sans lectures, qui dure un peu, il y a la découverte de la poésie, parce qu’elle ne raconte rien, et ne saurait rivaliser avec l’imaginaire d’un Tolkien. Elle va aimer Les Champs magnétiques de Breton et Soupault, et avec l’écriture automatique, sans le savoir encore, se découvrir un goût pour le jeu. Bien que la trop grande liberté ne lui convienne guère, ni trop de hasard. « Dans mon travail d’artiste, tout ce que je fais, c’est avec des contraintes que je m’impose » m’a-t-elle confié. Avant d’aller vers sa destinée oulipienne, Clémentine lit entre autres Alfred Jarry, s’initie à la pataphysique et à l’humour. Elle lit Francis Ponge, qui s’installe durablement parmi ses auteurs favoris. Elle aime sa rigueur, la précision de sa langue.

Elle est comme ça Clémentine : exigeante, et méthodique, sous des airs dilettantes.

D’ailleurs Francis Ponge a écrit Méthodes, une sorte de journal d’atelier dont elle fait grand cas. Ponge aimait les artistes. Clémentine est une artiste. Ponge aimait les mots et le jeu avec les mots. Clémentine aime le jeu avec les images, les livres et les mots. Tout naturellement, elle se nourrit de Queneau, de Perec, et lorsqu’elle publie son premier opus chez Grasset en 2014, c’est Jacques Roubaud qui en fait la préface. La voilà accueillie depuis peu dans la famille de l’Oulipo. Il ne lui restait plus qu’à être adoubée par les Papous sur France Culture. C’est chose faite.

Un premier ouvrage : Cent titres, nous propose cent couvertures de livres détournées. Ce sont des livres que nous connaissons tous, et des couvertures qui nous sont familières. Procédant par pastiches, allusions, calembours énormes (l’humour est parfois potache), l’effet comique est assuré, mais aussi un certain effet d’étrangeté, comme si ce petit attentat induisait une nouvelle approche, une nouvelle lecture du livre. Exemple : quand le livre de Jean Baudrillard : La société de consommation, devient La sommation à une société de cons

Tout cela est irrespectueux joyeusement et tendrement, car Clémentine Mélois aime profondément les livres et la lecture, et elle aime rire de ce qu’elle aime. Et partager.

Elle est comme ça, Clémentine, généreuse .

Elle collectionne aussi de drôles de choses. Des listes de courses, ramassées dans la rue, qu’elle entasse dans un carton à chaussures. Ces listes seront matières à rêveries. Pour chacun de ces textes anonymes, sans qualité apparente, elle imagine un court récit d’un peu de vie. C’est l’objet chez Grasset d’un second livre inventif et très touchant : Sinon j’oublie

Clémentine n’est pas poète, donc. C’est du moins ce qu’elle dit.

Mais par la fraîcheur de son regard, par sa fantaisie, sa liberté revendiquée dans son travail, son goût des mots, elle n’est pas loin de l’être.

Alain Girard-Daudon, 2016

Extrait de la lecture-concert dessinée avec Rodolphe Burger et Charles Berberian lors de MMP#20 (Musée d’arts de Nantes)

Lire la Gazette 2020 écrite par les élèves du lycée de l’Externat des Enfants Nantais. 

Lire l’interview de Clémentine Mélois par des élèves de 1er du lycée Nicolas Appert (Orvault).

Extrait de la causerie littéraire de Clémentine Mélois, lors de MidiMinuitPoésie #16, samedi 10 décembre 2016 au lieu unique :

Lire les notes de lecture écrites par les lycéens dans la GAZETTE DES LYCÉENS 2016

Lire l’interview de Clémentine Mélois par les lycéens dans ENTREVUES

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