Ron Silliman (auteur américain)

Ron Silliman ©Phil Journe

Explication de phrase :
« Si une forme s’y manifeste, certains refusent de lire. »

1. « Toute phrase a un commencement. »

2. « Nous savons un peu maintenant ce qu’est la prose. La prose est l’équilibre émotionnel qui fait la réalité des paragraphes et l’équilibre non-émotionnel qui fait la réalité des phrases et ayant complètement réalisé que les phrases ne sont pas émotionnelles et que les paragraphes le sont, la prose peut être l’équilibre essentiel produit au sein de quelque chose qui combine la phrase et le paragraphe… »

3. « La forme annonce sa propre fin : « Je saisprécisément combien de vers prendra ce sonnet ». En 1981, lorsque j’écris Albany, les éléments délibérément « inorganiques » de ma poésie provoquent encore la polémique, en particulier l’emploi de la répétition dans Ketjak et le système numérique de Fibonacci dans Tjanting. Depuis, la mode poétique n’a pas cessé et continuera certainement de changer.
Était-ce là « trahir » mes ancêtres littéraires (et dans quelle mesure étais-je prêt à assumer leur paternité) ? En un sens qu’Olson et Duncan auraient tous les deux compris, tout cela n’a jamais fait qu’un seul poème.

Schema Silliman

Schema Silliman

Celui-ci, pour être précis :
Quand je regarde ce schéma, que j’utilise depuis plusieurs années maintenant, il me dit que travailler, maintenir le sens de l’équilibre qui paraît régir mon intuition de la composition des choses consiste d’abord à me faire une idée de la taille et de l’échelle du niveau suivant de l’œuvre : il devra grossièrement être équivalent à tout ce qui a été fait jusque-là. « Grossièrement » est un terme très approximatif : The Alphabet est presque deux fois plus long que les autres livres du schéma. Combinés.
Le schéma ne montre pas comment, quand ou pourquoi les structures de mon œuvre ont changé : ses mécanismes ne portent plus tant la décomposition d’habitudes de perceptions que la définition d’une forme et de processus de subversion et de diversion. Cela commence très tôt dans The Alphabet. J’en vois déjà des traces dans la toute première sectionque j’ai écrite, « Force », un an avant Albany. »

4.« La ligne est inhérente à la lettre dressée, orientée. La parole n’est pas un donné. La langue est infectée. Il fait très froid. Les mots s’élancent dans le ciel de nuit, où il apparaît que le jour est l’exception, qu’il pourrait même être une fiction, une création non de la lumière mais du désir. JE VEUX LA PAROLE. Ciel, air, vent, soleil entourent. Faute de double-vitrage, nous pendions des édredons aux fenêtres. Les oiseaux agitent la neige tombée sur les branches fines. Faction traction. Ce n’est pas tant qu’on dort sous toutes ces couvertures mais qu’on cuit. Le crayon est un instrument contondant. Dans le coma, me dit-on, toute évidence d’infirmité disparaît, on baille librement, largement, comme un nourrisson baille dans son sommeil. Je n’entendrai plus d’oiseaux parmi ces arbres. Les mots s’élancent dans le ciel de nuit. »

 

Lire la note de lecture sur You, de Ron Silliman, février 2017.

Extrait de la lecture bilingue de Ron Silliman, lu en français par Martin Richet, traducteur. Au lieu unique dimanche 5 mars 2017, à l’occasion du festival Atlantide.

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