Violaine SCHWARTZ
Violaine Schwartz est comédienne, performeuse, chanteuse, et parfois tout cela en même temps car elle aime croiser les pratiques, multiplier les expériences, enjamber les frontières, ce qui l’a conduite ….. à l’écriture. Elle a commencé « dans les trous laissés par son métier de comédienne », en écrivant d’abord des pièces radiophoniques, ces « partitions pour voix qu’il faut imaginer avec l’oreille », puis à partir de 2010 des romans aux titres singuliers (La tête en arrière, le vent dans la bouche, une forêt dans la tête) et des pièces de théâtre aux titres non moins intrigants (Comment on freine ? J’empêche, peur du chat, que mon moineau ne sorte), le tout édité chez P.O.L, son éditeur fétiche et respecté.
Violaine Schwartz ne craint pas non plus la contrainte créative de l’écriture sous contrat. A l’origine de Papiers, publié en 2019, il y a une commande du Centre dramatique national de Besançon. Sa mission : recueillir la parole de demandeurs d’asile venus de partout : Afghanistan, Mauritanie, Ethiopie, Arménie, Irak… Ses moyens « J’avais un bureau dans le théâtre/J’avais un dictaphone/J’avais, parfois, un interprète à mes côtés », décrit-elle dans le prologue du livre.
Contrairement à ce qui peut parfois arriver aux œuvres issues de commande, Violaine Schwartz ne pratique pas l’exercice de style, brillant mais trop souvent futile et donc vain. Son travail extrêmement fidèle et précis sur la langue est au service de récits concrets et solides ce qui donne un texte éminemment politique et hélas toujours d’actualité. Tout a un sens dans ce recueil de témoignages plus terribles les uns que les autres, qui ne font en creux pas honneur à la démocratie bureaucratisée de notre vieux pays, la France, qui se revendique pourtant comme une terre d’accueil.
On retrouve ici la capacité de Violaine Schwartz à créer des voix, le souci d’honorer les langages pour en extraire la substantifique moelle, parcours que l’on apparente sans peine à une démarche poétique. L’auteure a travaillé avec le plus grand respect les témoignages qu’elle a recueillis et qu’elle égrène comme une mélopée, car si toutes ces histoires se ressemblent, aucune n’a le même son, aucune n’a le même ton, aucune n’a le même visage que l’on croit apercevoir au détour des phrases grâce à la qualité de l’écriture.
Compositrice électroacousticienne, Aude Rabillon aime de son côté tendre son micro, pour récolter les voix des anonymes ou les sons du quotidien : elle affectionne particulièrement les sons infimes ou les « presque rien » dans lesquels bruissent le silence fourmillant du monde, les grésillements, le bancal, les grincements, collectionnant tout ce qui décale, froisse ou crisse, et nous déplace ; poésie de l’instantané, si l’on sait l’écouter.
Les voix des anonymes recueillies par l’une, les sons du quotidien, les bruits du monde tel qu’il va en bien ou en mal proposés par l’autre devraient nous donner une rencontre particulièrement sensible.
Alain Anglaret – 16 octobre 2021
Voir un extrait de sa lecture-concert avec Aude Rabillon du samedi 16 octobre 2021 (festival MidiMinuitPoésie#21)
Lire la Gazette 2021 écrite par les élèves du lycée Louis-Jacques Goussier (Rezé).
Lire l’interview de Violaine Schwartz par des élèves de 1er du lycée Nicolas Appert (Orvault).