Rachel EASTERMAN-ULMANN
Chère Rachel Easterman-Ulmann,
Chère Poète,
Grâce à vous, j’ai découvert que j’étais la honte de ma famille, l’illusion du Grand Soir, le Gigi l’amoroso de Dalida, et à la fois une Candy Butch et une Stone Butch. Grâce à vous et à vos tests amoureux, romantiques, malicieux, poétiques, engagés, de La langue des oiseaux, avec pour sous-titre : QuelLE amoureuxSE êtes-vous ? J’ai donc additionné carrés, ronds, losanges et triangles me demandant, et vous Rachel Easterman-Ulmann, quelle poète êtes-vous ?
Vous êtes née en 1974, année de chansons d’amour dans le Top 20 telles que : Le mal-aimé et Le téléphone pleure de Claude François, Le premier pas de Claude-Michel Schönberg, Gigi l’amoroso de Dalida, Je t’aime, je t’aime, je t’aime de Johnny Hallyday. Quelle fée, la tête envahie de ces tubes inoubliables, s’est penchée au-dessus de votre berceau ? Cette fée Lilas, peut-être, jouée par Delphine Seyrig dans Peau d’âne, et qui ouvre votre série de tests ? Une fée que vous définissez ainsi : « Habituée à séduire, vous êtes désarmée quand vous rencontrez de la résistance. Vous prenez alors les armes et menez les batailles nécessaires à ces amours ». Ce tout premier test, vous l’avez imaginé pour celle dont vous étiez amoureuse. On aime à croire qu’il s’agit de vous, mais comme vous aimez jouer avec les personnalités, il s’agit peut-être de votre double fictif. Cet exercice en a déclenché d’autres, pour « continuer à communiquer » avec elle, et même après, « quand le silence s’est conclu sur un dernier rendez-vous qui a été autant la fin du monde que je le craignais » écrivez-vous dans votre Lettre imaginaire, pour « la plus belle fille du monde ». Vous vous jouez des codes dans ces tests pour dire à la fois la légèreté et la tristesse, la blessure, le chagrin d’amour, l’élan amoureux, « la vibration de l’attachement ». Les réponses apportées nous font traverser l’état amoureux, le vôtre, le nôtre, pour, peut-être, s’en défaire… Jusqu’à une prochaine fois. Alors, oui, écrire avec de la poésie, des mathématiques, de la philosophie, des chansons, une multitude de références culturelles. Tourner la langue pour tourner la page, embrasser la langue des oiseaux, celle qui donne un autre sens aux mots/maux. Et ainsi, nous faites-vous passer par l’état de chanson, d’illusion, de légume, de ponctuation, de romantique, de chaudasse, de butch, de féministe (car vous vous amusez aussi des clichés), de langue, de disparition.
Qui suis-je quand je suis amoureux-se ? Et de penser aux Fragments d’un discours amoureux de Barthes, où l’on pourrait cocher différemment les chapitres de son texte selon la personne aimée, selon l’amoureux-se que nous sommes. Aimer nous révèle à nous-même tout comme semblent le suggérer vos tests. Vous vous êtes nourrie de ce texte de Roland Barthes, mais aussi de Vingt poèmes d’amour et une chanson désespérée de Pablo Neruda, L’éthique de Spinoza, La Vie mode d’emploi de Georges Perec et Le corps lesbien de Monique Wittig.
L’amour, toujours l’amour, est l’objet de votre travail de plasticienne, de poète, ainsi ce conte Maurice ou la quête amoureuse d’un lapin queer, mi-humain mi-lapin, doté de deux seins et de trois cœurs, sauvé par Cendrillon, qui découvre les joies du polyamour, et dont Hector tombe amoureux. Oui, chère poète, vous êtes une romantique, quand on sait que l’accouplement des lapins dure trente secondes, en moyenne, mais qu’importe, l’amour, toujours, transforme tout, nous transforme, et vous-même inventez le romantisme trash, décalé, et sans hésiter, nous donnons à la poète notre langue au chat pour nous hisser vers La langue des oiseaux.
Sophie G. LUCAS
Lecture participative de La Langue des oiseaux. QuelLE amoureuxSE êtes vous ?
Mardi 5 Juin 2018, 19h30, Trempolino.